
ON STAGE PHOTOGRAPHY
Pour une photographie vivante ! En scène et sur scène.avec MPB la plus grande plateforme au monde de vente et location de matériel photographique et vidéo
L’Amphithéâtre d’Arles 02.07 - 07.07 | 2024
Sous les arches de l’amphithéâtre d’Arles, ON STAGE PHOTOGRAPHY inaugure un espace de découvertes où dialoguent les formes vivantes du spectacle avec les récits photographiques et ouvre un espace de réflexion et de partage autour de la photographie et de sa «mise en scène».
Une première édition placée avec pour thématique Gladiatrices, sous le parrainage de l’acteur et réalisateur Jean-Marc Barr.
Avec le soutien du Patrimoine de la Villes d’Arles, de MPB la plus grande plateforme au monde de vente et location de matériel photographique et vidéo, de Réflexivité(s) et Tokio Radio.
Une coproduction des associations “Entre nous c’est JUSTE TEXTUEL” et Photo Doc.


PRIX MPB & ON STAGE PHOTOGRAPHY


PRIX WIPPLAY & MPB

︎Pour plus d’infos
LES ENTRETIENS
avec les photographes Jean-François Spricigo et Sylvie Léget et avec l’acteur et réalisateur Didier Flamand- Jean-François Spricigo
ON STAGE PHOTOGRAPHY :
Jean-François Spricigo, tu as été invité à présenter un projet photographique lors de l'événement On Stage Photography pendant la première semaine des rencontres d'Arles.
Qu'est-ce qui relie les photographies que tu nous as présentées ? Tu nous as dit que tu étais contre l'idée de message – comment, donc, as-tu as fait ce choix de photos et qu'est-ce qui les relie ?
Jean-François Spricigo :
Être contre l'idée de message, c'est déjà en créer un autre. C'est précisément sortir de ce dualisme-là. C'est sortir de l'hypothèse qu'on ne peut aller vers l'autre qu'à travers l'idéologie et à supposer que j'aie une perspective, elle est celle de repositionner le naturel dans une articulation avec le culturel qui ne soit pas dominé.
De plus en plus, le culturel préside au naturel. Et pour moi, le naturel, c'est quoi ? C'est un retour à la beauté qui est au-delà de toute codification. Ce serait une beauté qui ne s'articule pas selon les arguments d'usage qui sont généralement idéologiques, mais qui sont de l'ordre de la transcendance.
Plus j'avance dans la vie, plus je me rends compte que la création, c'est ce qui a le plus à voir avec la foi. C'est un rapport d'intimité à la foi, mais au-delà de toute codification religieuse, évidemment, au-delà de tout aspect sectaire et surtout de tout aspect militant.
OSP :
Et même intellectuel, quelque part…
JFS :
Oui, bien sûr. C'est le piège des mots. Je me rends compte que j'aime les mots quand ils sont précis, mais surtout pas quand ils sont précieux. Quand ils sont précieux, il y a une volonté de convaincre. Quand ils sont précis, il y a une volonté d'honnêteté.
C'est la perspective qui est la mienne. Et ainsi me vient une idée…
Écoutez ça comme c'est beau cer que dit Simone Veil :
« On ne contemple pas sans quelque amour.
La contemplation de cette image de l'ordre du monde constitue un certain contact avec la beauté du monde. La beauté du monde, c'est l'ordre du monde aimé. »
Et ça me parle infiniment. « La beauté du monde, c'est l'ordre du monde aimé. »
Ça rejoint une autre perspective qui me plaît beaucoup par rapport au naturel, parce que finalement, le sauvage, pour le culturel, c'est ce qui s'approche le plus de l'anarchie. Parce que c'est au-delà de toute codification.
Et il y a cette autre phrase que je mets volontiers en vis-à-vis à celle de Simone Veil, qui est « L'anarchie, c'est l'ordre, moins le pouvoir. » Et je trouve que si on lui adosse cette phrase de Simone Veil, soudainement ça devient quelque chose d'extraordinaire.
« L'anarchie, c'est l'ordre, moins le pouvoir ». Et « la beauté du monde, c'est l'ordre du monde aimé. » Qu'en pensez-vous ? C'est très beau.
OSP :
Tout à fait. Si on parle d'ordre, justement, il y a quand même un choix.
Tu as présenté des photos. Et comment tu as fait ce choix ? Et pourquoi ?
JFS :
En fait, pour moi – je ne cherche pas à contourner vos questions, mesdames – mais il n'y a pas tant un choix que des évidences.
Dans le sens où, souvent, le choix suppose une forme de sacrifice. Mais pour moi, ce sont plutôt des évidences.
De la même façon qu'on ne commande pas aux émotions, on ne peut que constater l'émotion qui est neutre à l'instant où elle se présente. La proposition que je vous ai formulée était directement liée aux nécessités de l'instant. On en a discuté et soudain, c'était ça. Aujourd'hui, si on fait le même événement, ça sera peut-être autre chose... Parce que, précisément, je n'ai pas de message qui soit figé.
Je ne sais pas ce qui est bien. Je ne sais pas si le jaune, c'est mieux que le bleu. Je ne sais pas si la gauche, c'est mieux que la droite.
Je pense que tout est circonstanciel.
Et donc, à un moment donné, j'essaye d'avoir l'humilité de me rendre compte que ce n'est pas moi qui choisis. Et je pense que cette humilité, elle est assez universelle. Vous n'avez pas choisi votre sexualité. Vous n'avez pas choisi vos goûts. Vous ne choisissez pas la tête que vous avez. Vous avez la tête que vous avez.
C'est ce que c'est. Et donc, partant de là, ça m'a fait articuler la chose suivante qui est vraiment un principe qui m'apaise, en fait, c'est que je ne suis pas l'intention de la vie, je suis son expression. Et je crois que c'est ça, l'ordre du monde aimé.
C'est se rendre compte qu'on n'est pas là pour se servir, mais servir.
OSP :
Est-ce qu'il y avait un lien avec les photos de Véronique de Viguerie ? Est-ce que tu as pensé à ça ou pas du tout ?
JFS :
En fait, quand j'ai eu Véronique au téléphone, on s'est dit : « Tiens, on sera d'autant plus sincères à l'endroit de notre émerveillement, de notre sidération, de notre admiration, de notre déception, peu importe, l'émotion, si on vit les choses en même temps que le spectateur ».
Je suis contre toute forme de préparation. Parce que, comme tout le monde (s'il y a une qualité que je me prête volontiers, c'est celle de savoir que j'ai les mêmes défauts que tout le monde), si je prépare quelque chose, j'aurai bien du mal à ne pas vouloir plaire, à ne pas vouloir vous convaincre. Et à ce moment-là, je suis déjà dans une instrumentalisation de mon propos, aux fins de m'approprier une adhésion quelconque. Et plus j'avance dans la vie, plus je me rends compte que
chaque fois, quand je démarre une parole publique, la seule chose que je me dis, c'est attention, sois vigilant de ne surtout pas vouloir convaincre. Parce que vouloir convaincre, c'est réduire la situation à l'endroit de ce que je peux en faire. Et c'est pas chouette.
C'est s'interdire l'inattendu. Et donc, avec Véronique, ça m'avait assez plu, parce qu'elle est un peu punk aussi, cette dame, pour le peu qu'il m'a été donné de lui parler. Et ce côté punk me plaît.
Elle m'a dit : « Ah oui, bah oui, t'as raison. Écoute, je t'envoie des images, mais c'est pas grave, ne regarde pas. Et elle m'a dit, on va voir, on va faire des choses comme ça ».
Et je crois que ça permet aussi à soi de se surprendre, et dès lors, de ne pas actualiser la pensée d'hier, mais d'activer la sensation d'aujourd'hui. Il n'y a pas de sensation hier, il n'y a pas de sensation demain, il n'y a qu'une sensation aujourd'hui. Et je crois que c'est ça, le cœur de l'émotion à partager avec le spectateur, dans la mesure où, dans la perspective qui est mienne, je ne suis vraiment pas là pour convaincre.
L'ambition, s'il en est une, c'est partager. Et justement, pour rester sur cette rencontre avec Véronique de Viguerie, quelque chose a eu lieu : la puissance de l'instant.
OSP :
Donc, comment pourrais-tu exprimer la relation qui s'est opérée entre ta photographie et la sienne, ou en tout cas, vos deux constructions photographiques, ou vos regards ?
JFS :
C'est la connexion que je cherche, parce que je sais qu'elle a eu lieu. Elle a eu lieu, comment dire, à l'endroit de l'invisible.
Jean-François Spricigo, tu as été invité à présenter un projet photographique lors de l'événement On Stage Photography pendant la première semaine des rencontres d'Arles.
Qu'est-ce qui relie les photographies que tu nous as présentées ? Tu nous as dit que tu étais contre l'idée de message – comment, donc, as-tu as fait ce choix de photos et qu'est-ce qui les relie ?
Jean-François Spricigo :
Être contre l'idée de message, c'est déjà en créer un autre. C'est précisément sortir de ce dualisme-là. C'est sortir de l'hypothèse qu'on ne peut aller vers l'autre qu'à travers l'idéologie et à supposer que j'aie une perspective, elle est celle de repositionner le naturel dans une articulation avec le culturel qui ne soit pas dominé.
De plus en plus, le culturel préside au naturel. Et pour moi, le naturel, c'est quoi ? C'est un retour à la beauté qui est au-delà de toute codification. Ce serait une beauté qui ne s'articule pas selon les arguments d'usage qui sont généralement idéologiques, mais qui sont de l'ordre de la transcendance.
Plus j'avance dans la vie, plus je me rends compte que la création, c'est ce qui a le plus à voir avec la foi. C'est un rapport d'intimité à la foi, mais au-delà de toute codification religieuse, évidemment, au-delà de tout aspect sectaire et surtout de tout aspect militant.
OSP :
Et même intellectuel, quelque part…
JFS :
Oui, bien sûr. C'est le piège des mots. Je me rends compte que j'aime les mots quand ils sont précis, mais surtout pas quand ils sont précieux. Quand ils sont précieux, il y a une volonté de convaincre. Quand ils sont précis, il y a une volonté d'honnêteté.
C'est la perspective qui est la mienne. Et ainsi me vient une idée…
Écoutez ça comme c'est beau cer que dit Simone Veil :
« On ne contemple pas sans quelque amour.
La contemplation de cette image de l'ordre du monde constitue un certain contact avec la beauté du monde. La beauté du monde, c'est l'ordre du monde aimé. »
Et ça me parle infiniment. « La beauté du monde, c'est l'ordre du monde aimé. »
Ça rejoint une autre perspective qui me plaît beaucoup par rapport au naturel, parce que finalement, le sauvage, pour le culturel, c'est ce qui s'approche le plus de l'anarchie. Parce que c'est au-delà de toute codification.
Et il y a cette autre phrase que je mets volontiers en vis-à-vis à celle de Simone Veil, qui est « L'anarchie, c'est l'ordre, moins le pouvoir. » Et je trouve que si on lui adosse cette phrase de Simone Veil, soudainement ça devient quelque chose d'extraordinaire.
« L'anarchie, c'est l'ordre, moins le pouvoir ». Et « la beauté du monde, c'est l'ordre du monde aimé. » Qu'en pensez-vous ? C'est très beau.
OSP :
Tout à fait. Si on parle d'ordre, justement, il y a quand même un choix.
Tu as présenté des photos. Et comment tu as fait ce choix ? Et pourquoi ?
JFS :
En fait, pour moi – je ne cherche pas à contourner vos questions, mesdames – mais il n'y a pas tant un choix que des évidences.
Dans le sens où, souvent, le choix suppose une forme de sacrifice. Mais pour moi, ce sont plutôt des évidences.
De la même façon qu'on ne commande pas aux émotions, on ne peut que constater l'émotion qui est neutre à l'instant où elle se présente. La proposition que je vous ai formulée était directement liée aux nécessités de l'instant. On en a discuté et soudain, c'était ça. Aujourd'hui, si on fait le même événement, ça sera peut-être autre chose... Parce que, précisément, je n'ai pas de message qui soit figé.
Je ne sais pas ce qui est bien. Je ne sais pas si le jaune, c'est mieux que le bleu. Je ne sais pas si la gauche, c'est mieux que la droite.
Je pense que tout est circonstanciel.
Et donc, à un moment donné, j'essaye d'avoir l'humilité de me rendre compte que ce n'est pas moi qui choisis. Et je pense que cette humilité, elle est assez universelle. Vous n'avez pas choisi votre sexualité. Vous n'avez pas choisi vos goûts. Vous ne choisissez pas la tête que vous avez. Vous avez la tête que vous avez.
C'est ce que c'est. Et donc, partant de là, ça m'a fait articuler la chose suivante qui est vraiment un principe qui m'apaise, en fait, c'est que je ne suis pas l'intention de la vie, je suis son expression. Et je crois que c'est ça, l'ordre du monde aimé.
C'est se rendre compte qu'on n'est pas là pour se servir, mais servir.
OSP :
Est-ce qu'il y avait un lien avec les photos de Véronique de Viguerie ? Est-ce que tu as pensé à ça ou pas du tout ?
JFS :
En fait, quand j'ai eu Véronique au téléphone, on s'est dit : « Tiens, on sera d'autant plus sincères à l'endroit de notre émerveillement, de notre sidération, de notre admiration, de notre déception, peu importe, l'émotion, si on vit les choses en même temps que le spectateur ».
Je suis contre toute forme de préparation. Parce que, comme tout le monde (s'il y a une qualité que je me prête volontiers, c'est celle de savoir que j'ai les mêmes défauts que tout le monde), si je prépare quelque chose, j'aurai bien du mal à ne pas vouloir plaire, à ne pas vouloir vous convaincre. Et à ce moment-là, je suis déjà dans une instrumentalisation de mon propos, aux fins de m'approprier une adhésion quelconque. Et plus j'avance dans la vie, plus je me rends compte que
chaque fois, quand je démarre une parole publique, la seule chose que je me dis, c'est attention, sois vigilant de ne surtout pas vouloir convaincre. Parce que vouloir convaincre, c'est réduire la situation à l'endroit de ce que je peux en faire. Et c'est pas chouette.
C'est s'interdire l'inattendu. Et donc, avec Véronique, ça m'avait assez plu, parce qu'elle est un peu punk aussi, cette dame, pour le peu qu'il m'a été donné de lui parler. Et ce côté punk me plaît.
Elle m'a dit : « Ah oui, bah oui, t'as raison. Écoute, je t'envoie des images, mais c'est pas grave, ne regarde pas. Et elle m'a dit, on va voir, on va faire des choses comme ça ».
Et je crois que ça permet aussi à soi de se surprendre, et dès lors, de ne pas actualiser la pensée d'hier, mais d'activer la sensation d'aujourd'hui. Il n'y a pas de sensation hier, il n'y a pas de sensation demain, il n'y a qu'une sensation aujourd'hui. Et je crois que c'est ça, le cœur de l'émotion à partager avec le spectateur, dans la mesure où, dans la perspective qui est mienne, je ne suis vraiment pas là pour convaincre.
L'ambition, s'il en est une, c'est partager. Et justement, pour rester sur cette rencontre avec Véronique de Viguerie, quelque chose a eu lieu : la puissance de l'instant.
OSP :
Donc, comment pourrais-tu exprimer la relation qui s'est opérée entre ta photographie et la sienne, ou en tout cas, vos deux constructions photographiques, ou vos regards ?
JFS :
C'est la connexion que je cherche, parce que je sais qu'elle a eu lieu. Elle a eu lieu, comment dire, à l'endroit de l'invisible.
Ce n'est pas un endroit démonstratif. Peut-être a-t-il été stimulé, de mon point de vue, quand Véronique a dit, je ne sais plus où, qu’elle fait des photos en gardant ses lunettes roses. Et je trouvais ça extrêmement impétueux de la part d'une journaliste dans une thématique aussi confrontationnelle que la sienne, d'assumer de dire qu'elle n'est pas là pour documenter.
Elle a l'honnêteté de dire qu'elle voit les choses depuis ce qu'elle est. Et ce qu'elle est, c'est ça. Et quand elle te parle, on est loin de toute forme d'ornement.
Elle va tout droit. C'est quelque chose qui m'a plu, que l'étiquette ne corresponde pas au produit. Et ça, c'est toujours une joie, que les gens soient en dehors de ce que la doxa attend.
Et avec Véronique, il y a eu aussi je pense, une intensité des sujets. J’ai l'impression que dans ses photos, elle ne recherche pas idéologiquement dans les conflits à savoir qui a raison. Sa question, c'est plutôt dans cette situation précise, quelle trace de l'humain reste-t-il ? Quelle trace de l'humain pouvons-nous encore voir germer ? C'est ce qui m'a touché dans son travail.
Je vous prie de m'excuser, j'ai évoqué avec un esprit un peu taquin parce que je sais que le sujet homme-femme est très soutenu en ce moment en France que je trouvais intéressant de se rendre compte que l'intensité, la beauté n'est pas soumise à la polarité, qu'elle soit ethnique ou sexuelle ou quel qu'autre catégorie que ce soit. C'est quelque chose qui a vraiment à voir avec un don de soi. Pour moi, ce qui importe dans la vie, c'est une phrase que je dis souvent, donc pardon si vous l'avez déjà entendue 200 fois, ce n'est pas la forme que la vie a choisi de prendre, mais c'est la vie dans la forme.
Et moi, c'est ça qui m'intéresse dans l'être. J’ai le même respect pour l'arbre, le chien, la femme, l'homme, noir, grand, petit, je m'en fous.
Que Véronique soit une femme, c'est un non-événement pour moi. Et je trouve qu'on positionne très souvent les choses à cet endroit-là en argumentant.
C'est une phrase que je trouve souvent ridicule : « en tant que femme, en tant qu'homme, en tant que belge… », c'est croire au personnage. Et je pense que nous sommes bien plus que cela quand on est au service de la vie qui nous traverse. De mon point de vue, mon existence n'a strictement aucune importance.
Ce qui importe, c'est la disponibilité à la vie qui traverse cette existence. Et là, on atteint un champ des possibles qui ne cherche plus précisément à atteindre quoi que ce soit. On est animé par la joie, par la nécessité, par l'intensité. C'est un geste gratuit.
C'est une forme de foi, une forme de transcendance. Il n'est pas demandé d'être toujours à cette température-là. Je suis bien aussi médiocre que tout à chacun.
Mais, dans les photos de Véronique, pour enfin répondre, j'espère, à votre question, je trouve qu'elle se lance dans ce qu'elle fait en ne se planquant pas derrière un personnage, même si ce personnage est visible. Il n'y a aucun doute sur le fait que ce soit une femme mais elle n'en fait pas un critère. En tout cas, je ne les vois pas comme ça. Je les vois comme quelque chose qui parle de plus loin, au-delà des codifications.
Et je dois dire que les photos de Véronique de Viguerie me déplacent au regard de ce qui m’est familier. À ce propos, le point sur lequel je tiens à insister, mesdames (ce n'est pas de la flagornerie, je n'ai rien à vous demander, je n'ai rien à vous vendre), c’est combien je suis en gratitude que vous ayez pensé à moi pour un exercice qui n'appartient vraiment pas à l'ordre du choix, mais de l'évidence. Il a surgi d'une façon merveilleusement vertueuse et je pense que vous tenez là un principe qui est bien nécessaire à une époque narcissique d'un Instagram qui ne se tourne que vers le selfie, celui de solliciter un être pour parler d'un autre.
C'est tellement évident qu'on se demande pourquoi ça n'existe pas depuis trente ans. Je suis réellement en gratitude, mesdames, à chacune de vous, et honoré que vous ayez pensé à moi pour pareil exercice et que vous ayez eu aussi l'insolence de vous dire, tiens, on va mettre Jean-François Spricigo avec Véronique de Viguerie. Je trouve que vous êtes des reines du casting.
OSP :
Tu fais partie des gens qui justement mêlent la photo, le texte et la scène. Qu'est-ce que le texte peut apporter à la photo, qu'est-ce que la photo peut apporter au texte, qu'est-ce que la dimension scénique peut apporter ?
JFS :
Il peut y avoir un certain nombre d'artistes visuels qui se perdent dans des concepts totalement creux et je trouve que, soudainement, de les confronter à la parole, ça permet de se rendre compte qu'il s'agit bien d'un tonneau vide. Et je trouvais ça bien, parce que là aussi, ce que vous proposiez, c'est un exercice d'humilité.
Souvent est-il dit que les artistes visuels, du moins, sont peu outillés à la parole.
Eh bien là, vous leur donnez la possibilité de se rendre compte que c'est un prérequis qui est faux. Et que chacun, dès lors qu'il est dans l'attention nécessaire, la bienveillance nécessaire, et qu'il se rend compte qu'il n'est pas là pour se servir, mais servir, le propos vient tout seul. Il n'y a pas besoin d'être un tribun hors pair pour soutenir son propos. Parce que même le silence devient éloquent.
Sachez mesdames que vous avez offert tout ça dans cette formule d’ON STAGE PHOTOGRAPHY. Je trouve vraiment, je ne peux que souhaiter, encourager que ça continue. Parce que je crois que ça fera beaucoup de bien à la sincérité.
OSP :
Je sais que tu dis facilement que tu te fiches du matériel et en même temps, dans le questionnaire, tu avoues que tu n'as jamais changé et que tu as toujours été dans l'analogique. Est-ce que le fait de rester en analogique a une implication dans ton travail ? Est-ce que tu peux imaginer changer et pour quoi faire ?
JFS :
Concrètement, j'ai déjà changé à l'endroit de l'usage. Comme je vous ai dit, pour moi, tout est circonstanciel.
Quand il s'agit de faire un clip, je tourne naturellement en vidéo. Quand il s'agit de faire des photos, où il faut aller vite, quand c'est pour un usage « professionnel » à ce moment-là, et non plus « amateur ». Sachant combien je voue au genre amateur tout mon respect, étant donné que l'étymologie d'amateur, c'est : qui aime. Gardons-nous bien d'être professionnels !
Quand il s'agit d'être professionnel, le numérique répond parfaitement aux fonctionnalités de célérité nécessaires à la production du document.
En revanche, peut-être est-ce mon manque de maturité qui fait qu’avec le numérique, je suis comme tout le monde, je regarde la photo que je viens de faire. Et, ce faisant, je perds ma relation au sujet. Parce que je viens de réifier le sujet à l'endroit d'une preuve, d'une image. L'argentique n'offre pas cette possibilité. Ça me permet d'être tranquille et de rester dans cette dimension-là.
Et moi qui suis un impatient proverbial, le fait d'attendre, ça me permet de ne pas croire que j'ai raison. Avez-vous remarqué combien, quand il vous vient des idées, souvent, la première idée est extrêmement séduisante mais il faut être vigilant à la seconde à laquelle elle vous mène, qui est silencieuse, qui est souterraine et souvent plus intéressante. Donc c'est une question à la fois d'attente, de maturation pour aller accueillir le vrai poisson.
Elle a l'honnêteté de dire qu'elle voit les choses depuis ce qu'elle est. Et ce qu'elle est, c'est ça. Et quand elle te parle, on est loin de toute forme d'ornement.
Elle va tout droit. C'est quelque chose qui m'a plu, que l'étiquette ne corresponde pas au produit. Et ça, c'est toujours une joie, que les gens soient en dehors de ce que la doxa attend.
Et avec Véronique, il y a eu aussi je pense, une intensité des sujets. J’ai l'impression que dans ses photos, elle ne recherche pas idéologiquement dans les conflits à savoir qui a raison. Sa question, c'est plutôt dans cette situation précise, quelle trace de l'humain reste-t-il ? Quelle trace de l'humain pouvons-nous encore voir germer ? C'est ce qui m'a touché dans son travail.
Je vous prie de m'excuser, j'ai évoqué avec un esprit un peu taquin parce que je sais que le sujet homme-femme est très soutenu en ce moment en France que je trouvais intéressant de se rendre compte que l'intensité, la beauté n'est pas soumise à la polarité, qu'elle soit ethnique ou sexuelle ou quel qu'autre catégorie que ce soit. C'est quelque chose qui a vraiment à voir avec un don de soi. Pour moi, ce qui importe dans la vie, c'est une phrase que je dis souvent, donc pardon si vous l'avez déjà entendue 200 fois, ce n'est pas la forme que la vie a choisi de prendre, mais c'est la vie dans la forme.
Et moi, c'est ça qui m'intéresse dans l'être. J’ai le même respect pour l'arbre, le chien, la femme, l'homme, noir, grand, petit, je m'en fous.
Que Véronique soit une femme, c'est un non-événement pour moi. Et je trouve qu'on positionne très souvent les choses à cet endroit-là en argumentant.
C'est une phrase que je trouve souvent ridicule : « en tant que femme, en tant qu'homme, en tant que belge… », c'est croire au personnage. Et je pense que nous sommes bien plus que cela quand on est au service de la vie qui nous traverse. De mon point de vue, mon existence n'a strictement aucune importance.
Ce qui importe, c'est la disponibilité à la vie qui traverse cette existence. Et là, on atteint un champ des possibles qui ne cherche plus précisément à atteindre quoi que ce soit. On est animé par la joie, par la nécessité, par l'intensité. C'est un geste gratuit.
C'est une forme de foi, une forme de transcendance. Il n'est pas demandé d'être toujours à cette température-là. Je suis bien aussi médiocre que tout à chacun.
Mais, dans les photos de Véronique, pour enfin répondre, j'espère, à votre question, je trouve qu'elle se lance dans ce qu'elle fait en ne se planquant pas derrière un personnage, même si ce personnage est visible. Il n'y a aucun doute sur le fait que ce soit une femme mais elle n'en fait pas un critère. En tout cas, je ne les vois pas comme ça. Je les vois comme quelque chose qui parle de plus loin, au-delà des codifications.
Et je dois dire que les photos de Véronique de Viguerie me déplacent au regard de ce qui m’est familier. À ce propos, le point sur lequel je tiens à insister, mesdames (ce n'est pas de la flagornerie, je n'ai rien à vous demander, je n'ai rien à vous vendre), c’est combien je suis en gratitude que vous ayez pensé à moi pour un exercice qui n'appartient vraiment pas à l'ordre du choix, mais de l'évidence. Il a surgi d'une façon merveilleusement vertueuse et je pense que vous tenez là un principe qui est bien nécessaire à une époque narcissique d'un Instagram qui ne se tourne que vers le selfie, celui de solliciter un être pour parler d'un autre.
C'est tellement évident qu'on se demande pourquoi ça n'existe pas depuis trente ans. Je suis réellement en gratitude, mesdames, à chacune de vous, et honoré que vous ayez pensé à moi pour pareil exercice et que vous ayez eu aussi l'insolence de vous dire, tiens, on va mettre Jean-François Spricigo avec Véronique de Viguerie. Je trouve que vous êtes des reines du casting.
OSP :
Tu fais partie des gens qui justement mêlent la photo, le texte et la scène. Qu'est-ce que le texte peut apporter à la photo, qu'est-ce que la photo peut apporter au texte, qu'est-ce que la dimension scénique peut apporter ?
JFS :
Il peut y avoir un certain nombre d'artistes visuels qui se perdent dans des concepts totalement creux et je trouve que, soudainement, de les confronter à la parole, ça permet de se rendre compte qu'il s'agit bien d'un tonneau vide. Et je trouvais ça bien, parce que là aussi, ce que vous proposiez, c'est un exercice d'humilité.
Souvent est-il dit que les artistes visuels, du moins, sont peu outillés à la parole.
Eh bien là, vous leur donnez la possibilité de se rendre compte que c'est un prérequis qui est faux. Et que chacun, dès lors qu'il est dans l'attention nécessaire, la bienveillance nécessaire, et qu'il se rend compte qu'il n'est pas là pour se servir, mais servir, le propos vient tout seul. Il n'y a pas besoin d'être un tribun hors pair pour soutenir son propos. Parce que même le silence devient éloquent.
Sachez mesdames que vous avez offert tout ça dans cette formule d’ON STAGE PHOTOGRAPHY. Je trouve vraiment, je ne peux que souhaiter, encourager que ça continue. Parce que je crois que ça fera beaucoup de bien à la sincérité.
OSP :
Je sais que tu dis facilement que tu te fiches du matériel et en même temps, dans le questionnaire, tu avoues que tu n'as jamais changé et que tu as toujours été dans l'analogique. Est-ce que le fait de rester en analogique a une implication dans ton travail ? Est-ce que tu peux imaginer changer et pour quoi faire ?
JFS :
Concrètement, j'ai déjà changé à l'endroit de l'usage. Comme je vous ai dit, pour moi, tout est circonstanciel.
Quand il s'agit de faire un clip, je tourne naturellement en vidéo. Quand il s'agit de faire des photos, où il faut aller vite, quand c'est pour un usage « professionnel » à ce moment-là, et non plus « amateur ». Sachant combien je voue au genre amateur tout mon respect, étant donné que l'étymologie d'amateur, c'est : qui aime. Gardons-nous bien d'être professionnels !
Quand il s'agit d'être professionnel, le numérique répond parfaitement aux fonctionnalités de célérité nécessaires à la production du document.
En revanche, peut-être est-ce mon manque de maturité qui fait qu’avec le numérique, je suis comme tout le monde, je regarde la photo que je viens de faire. Et, ce faisant, je perds ma relation au sujet. Parce que je viens de réifier le sujet à l'endroit d'une preuve, d'une image. L'argentique n'offre pas cette possibilité. Ça me permet d'être tranquille et de rester dans cette dimension-là.
Et moi qui suis un impatient proverbial, le fait d'attendre, ça me permet de ne pas croire que j'ai raison. Avez-vous remarqué combien, quand il vous vient des idées, souvent, la première idée est extrêmement séduisante mais il faut être vigilant à la seconde à laquelle elle vous mène, qui est silencieuse, qui est souterraine et souvent plus intéressante. Donc c'est une question à la fois d'attente, de maturation pour aller accueillir le vrai poisson.
- Sylvie Léget
ON STAGE PHOTOGRAPHY :
Sylvie Léget, vous avez été invitée à présenter un projet photographique lors de l’évènement ON STAGE PHOTOGRAPHY, pendant la première semaine des Rencontres d’Arles. Pouvez-vous nous le présenter ? Quel en était son message principal ?
Sylvie Léget :
C’est dans le cadre d’un En Aparté avec Mathieu Chazal, que Le vol des chauves-souris la nuit a été partagé. C’est un travail sur le cheminent mémoriel que m’évoquent mes représentions mentales du génocide khmer et de ses conséquences. J’y interroge les mécanismes de reconstruction d'une mémoire en procédant à une archéologie émotionnelle, en jouant sur la confrontation entre mémoire et imaginaire, entre reconstruction des images manquantes et réalité actuelle. En toile de fond, un événement historique : le cinquantenaire de la chute de Phnom Penh aux mains des Khmers rouges – avril 2025.
En partant d’un point de vue affectif, je raconte une expérience personnelle fondatrice, celle de mes premières photos dites humanitaires, et qui n’en rejoint pas moins la grande histoire. Ma mémoire se révèle alors fragmentaire et incertaine, et m’amène à réfléchir sur ce qui nous reste à tous, de notre histoire propre et de la mémoire collective. Et quels peuvent être les marqueurs émotionnels qui jalonnent la construction d’une mémoire.
OSP :
Pouvez-vous nous parler de l’origine de l’idée ainsi que de ses étapes clés ?
Sylvie Léget :
Ancienne humanitaire en mission à Phnom Penh en 1989, je suis retournée au Cambodge en 2022 et ai tenté de reconstruire les bribes mémorielles de mon passage à Phnom Penh et Kâmpôt en m’aidant de mes planches-contacts de l’époque.
Lors de ce séjour, la fragilité de la mémoire, tant la mienne que celle d’un peuple traumatisé par un génocide, m’a fortement interpellée. J’ai donc décidé d’y retourner pour me confronter à cette impression, la valider ou l’invalider.
J’ai ensuite entrepris des recherches sur la thématique de la mémoire et approfondi mes connaissances socio-politiques du Cambodge, surtout en relation avec le génocide khmer rouge. Ce projet convoque des archives personnelles, des recherches bibliographiques et cinématographiques. Lors de sa présentation à ON STAGE PHOTOGRAPHY, ce travail était en cours de réalisation. Depuis, je suis retournée au Cambodge pendant 7 semaines. J’y ai développé de nouveaux axes, que j’espère riches de sens et de questionnement.
OSP :
Quelle a été votre démarche pour ce projet ? Et quel a été l’équipement photo que vous avez utilisé ?
Sylvie Léget :
Avec la photographie, en confrontant des images d’archives personnelles datant de 1989 avec ma vision actuelle qui est représentée par des prises de vue récentes (2022 et 2024).
Partant des images mentales que j’ai façonnées sur la base des souvenirs de ma mission humanitaire et de mes connaissances de l’histoire du Cambodge, j’essaie de construire des images que je n’avais pas prises à l’époque. Il s’agit là d’une photo-évocatrice, voire allégorique. On n’y voit que peu de visages, les compositions sont épurées, évoquant ainsi la place des fantômes dans notre mémoire.
Les quelques diapositives d’archives, quant à elles, montrent la population khmère victime du régime khmer rouge.
Sylvie Léget, vous avez été invitée à présenter un projet photographique lors de l’évènement ON STAGE PHOTOGRAPHY, pendant la première semaine des Rencontres d’Arles. Pouvez-vous nous le présenter ? Quel en était son message principal ?
Sylvie Léget :
C’est dans le cadre d’un En Aparté avec Mathieu Chazal, que Le vol des chauves-souris la nuit a été partagé. C’est un travail sur le cheminent mémoriel que m’évoquent mes représentions mentales du génocide khmer et de ses conséquences. J’y interroge les mécanismes de reconstruction d'une mémoire en procédant à une archéologie émotionnelle, en jouant sur la confrontation entre mémoire et imaginaire, entre reconstruction des images manquantes et réalité actuelle. En toile de fond, un événement historique : le cinquantenaire de la chute de Phnom Penh aux mains des Khmers rouges – avril 2025.
En partant d’un point de vue affectif, je raconte une expérience personnelle fondatrice, celle de mes premières photos dites humanitaires, et qui n’en rejoint pas moins la grande histoire. Ma mémoire se révèle alors fragmentaire et incertaine, et m’amène à réfléchir sur ce qui nous reste à tous, de notre histoire propre et de la mémoire collective. Et quels peuvent être les marqueurs émotionnels qui jalonnent la construction d’une mémoire.
OSP :
Pouvez-vous nous parler de l’origine de l’idée ainsi que de ses étapes clés ?
Sylvie Léget :
Ancienne humanitaire en mission à Phnom Penh en 1989, je suis retournée au Cambodge en 2022 et ai tenté de reconstruire les bribes mémorielles de mon passage à Phnom Penh et Kâmpôt en m’aidant de mes planches-contacts de l’époque.
Lors de ce séjour, la fragilité de la mémoire, tant la mienne que celle d’un peuple traumatisé par un génocide, m’a fortement interpellée. J’ai donc décidé d’y retourner pour me confronter à cette impression, la valider ou l’invalider.
J’ai ensuite entrepris des recherches sur la thématique de la mémoire et approfondi mes connaissances socio-politiques du Cambodge, surtout en relation avec le génocide khmer rouge. Ce projet convoque des archives personnelles, des recherches bibliographiques et cinématographiques. Lors de sa présentation à ON STAGE PHOTOGRAPHY, ce travail était en cours de réalisation. Depuis, je suis retournée au Cambodge pendant 7 semaines. J’y ai développé de nouveaux axes, que j’espère riches de sens et de questionnement.
OSP :
Quelle a été votre démarche pour ce projet ? Et quel a été l’équipement photo que vous avez utilisé ?
Sylvie Léget :
Avec la photographie, en confrontant des images d’archives personnelles datant de 1989 avec ma vision actuelle qui est représentée par des prises de vue récentes (2022 et 2024).
Partant des images mentales que j’ai façonnées sur la base des souvenirs de ma mission humanitaire et de mes connaissances de l’histoire du Cambodge, j’essaie de construire des images que je n’avais pas prises à l’époque. Il s’agit là d’une photo-évocatrice, voire allégorique. On n’y voit que peu de visages, les compositions sont épurées, évoquant ainsi la place des fantômes dans notre mémoire.
Les quelques diapositives d’archives, quant à elles, montrent la population khmère victime du régime khmer rouge.
Avec l’écrit, par un texte poétique et autobiographique relatif à la façon dont s’est construite l’image du Cambodge et les traces qu’elle a laissées dans ma mémoire.
Avec le récit oral, au travers d’interviews récentes de Khmers et d’étrangers ayant vécu les événements de 1975 (prise de pouvoir par les Khmers rouges) ou en ayant subi les conséquences.
En 1989, je travaillais avec un Nikon argentique. En 2022, avec un Fuji XT-4 et en 2024 avec un Nikon Zf. Je travaille soit avec un zoom 24-70 mm, soit avec un 28 ou 40mm.
OSP :
Existe-t-il une différence entre votre technique et l’équipement photographique actuel, comparé au début de votre carrière?
Sylvie Léget :
A l’époque de l’argentique, selon mes travaux, j’utilisais simultanément deux boitiers : un pour le N/B et un pour la couleur. Aujourd’hui, je ne travaille plus qu’en couleur (numérique), notamment parce que le rendu numérique du N/B ne me séduit pas autant.
Travailler à l’argentique nécessitait un temps de réflexion plus long avant chaque prise de vue. Lors de mon dernier travail, je me suis aussi imposée ce même temps de réflexion.
OSP :
Si oui, comment ces changements ont-ils influencés votre approche artistique ?
Sylvie Léget :
Mon équipement photographique actuel me permet de travailler plus facilement en basse lumière, ce qui est très important pour moi ne travaillant qu’en lumière naturelle et privilégiant les clairs-obscurs. La rapidité de l’autofocus et la vidéo exercent une influence certaine sur les possibilités techniques dont je profite pour explorer d’autres approches.
OSP :
Suite à votre expérience avec ON STAGE PHOTOGRAPHY, comment la dimension scénique vous semble-t-elle pouvoir enrichir la pratique de la photographie, et la vôtre en particulier?
Sylvie Léget :
En premier lieu grâce à l’exercice de l’En Aparté, j’ai énormément apprécié de passer du temps à analyser le travail d’un autre photographe, puis de le commenter sur scène et de dialoguer avec son auteur. En retour, il fut également très riche d’» entendre le regard » de l’autre sur mon travail. Ces échanges sont d’autant plus importants que le travail photographique est souvent très solitaire en termes de feedback.
La dimension scénique permet d’incarner encore davantage ses propres images. J’imagine que seul un travail personnel, senti et authentique peut passer la rampe de la scène, où il s’avère périlleux de tricher.
Penser et faire une image convoque souvent d’autres sens que celui de la vue. Présenter son travail sur scène en est peut-être un développement naturel. Il y a également une sorte de mise à nue qui n’a pas, me semble-t-il, la même intensité lors d’une exposition.
OSP :
Que pourriez-vous imaginer de cette relation pour aller plus loin encore ?
Sylvie Léget :
La voix est une dimension sensible qui permet de toucher autrui différemment. J’ai par exemple été très émue d’entendre des comédiens lire mon texte « photo de tête ». D’ailleurs, j’ai beaucoup retiré du fait de réfléchir à l’impact qu’a eu sur ma démarche photographique l’image que je n’ai pas prise et dont j’avais choisi de parler.
Aller plus loin encore, équivaudrait à multiplier les interactions entre auteurs – spectateurs – sujets- autres artistes. Et je serais ravie d’y participer !
Avec le récit oral, au travers d’interviews récentes de Khmers et d’étrangers ayant vécu les événements de 1975 (prise de pouvoir par les Khmers rouges) ou en ayant subi les conséquences.
En 1989, je travaillais avec un Nikon argentique. En 2022, avec un Fuji XT-4 et en 2024 avec un Nikon Zf. Je travaille soit avec un zoom 24-70 mm, soit avec un 28 ou 40mm.
OSP :
Existe-t-il une différence entre votre technique et l’équipement photographique actuel, comparé au début de votre carrière?
Sylvie Léget :
A l’époque de l’argentique, selon mes travaux, j’utilisais simultanément deux boitiers : un pour le N/B et un pour la couleur. Aujourd’hui, je ne travaille plus qu’en couleur (numérique), notamment parce que le rendu numérique du N/B ne me séduit pas autant.
Travailler à l’argentique nécessitait un temps de réflexion plus long avant chaque prise de vue. Lors de mon dernier travail, je me suis aussi imposée ce même temps de réflexion.
OSP :
Si oui, comment ces changements ont-ils influencés votre approche artistique ?
Sylvie Léget :
Mon équipement photographique actuel me permet de travailler plus facilement en basse lumière, ce qui est très important pour moi ne travaillant qu’en lumière naturelle et privilégiant les clairs-obscurs. La rapidité de l’autofocus et la vidéo exercent une influence certaine sur les possibilités techniques dont je profite pour explorer d’autres approches.
OSP :
Suite à votre expérience avec ON STAGE PHOTOGRAPHY, comment la dimension scénique vous semble-t-elle pouvoir enrichir la pratique de la photographie, et la vôtre en particulier?
Sylvie Léget :
En premier lieu grâce à l’exercice de l’En Aparté, j’ai énormément apprécié de passer du temps à analyser le travail d’un autre photographe, puis de le commenter sur scène et de dialoguer avec son auteur. En retour, il fut également très riche d’» entendre le regard » de l’autre sur mon travail. Ces échanges sont d’autant plus importants que le travail photographique est souvent très solitaire en termes de feedback.
La dimension scénique permet d’incarner encore davantage ses propres images. J’imagine que seul un travail personnel, senti et authentique peut passer la rampe de la scène, où il s’avère périlleux de tricher.
Penser et faire une image convoque souvent d’autres sens que celui de la vue. Présenter son travail sur scène en est peut-être un développement naturel. Il y a également une sorte de mise à nue qui n’a pas, me semble-t-il, la même intensité lors d’une exposition.
OSP :
Que pourriez-vous imaginer de cette relation pour aller plus loin encore ?
Sylvie Léget :
La voix est une dimension sensible qui permet de toucher autrui différemment. J’ai par exemple été très émue d’entendre des comédiens lire mon texte « photo de tête ». D’ailleurs, j’ai beaucoup retiré du fait de réfléchir à l’impact qu’a eu sur ma démarche photographique l’image que je n’ai pas prise et dont j’avais choisi de parler.
Aller plus loin encore, équivaudrait à multiplier les interactions entre auteurs – spectateurs – sujets- autres artistes. Et je serais ravie d’y participer !
- Didier Flamand
ON STAGE PHOTOGRAPHY :
Didier Flamand, vous êtes acteur, metteur en scène et réalisateur, parlez-nous de votre rencontre avec ON STAGE PHOTOGRAPHY qui s’est d’abord faite du point de vue du spectateur. Résonne-t-elle avec certaines de vos réalisations ? Et en quoi ?
DIDIER FLAMAND :
Oui, je peux dire qu’elle résonne tout particulièrement avec certaines de mes réalisations théâtrales qui ont été conçues pour des lieux qui n’étaient pas des théâtres mais d’anciens hangars ou bâtiments industriels, lesquels, par un phénomène de fusion entre leur histoire propre, celle du temps, et la mise en scène, ajoutaient aux propos de la pièce un décalage souvent très intéressant, vecteur d’émotions rares et précieuses.
OSP :
Vous habitez Arles et avez une habitude des Rencontres photographiques, comment avez-vous vécu ces moments dans l’Amphithéâtre d’Arles en juillet ?
DF :
Très agréablement, découvrant autrement ce lieu que je connais bien mais dédié avec ON STAGE PHOTOGRAPHY à de nouvelles occupations qui permettent non seulement de le mettre en valeur mais de faire partager par la même occasion à un nouveau public la richesse incroyable qu’offre Arles pour le développement d’évènements culturels.
OSP :
Que vous a apporté d’inattendu cette relation de la scène et de la photographie proposée par ON STAGE PHOTOGRAPHY ?
DF :
J’ai beaucoup aimé le principe qui consistait à mettre face à face deux photographes avec les En Apartés, chacun étant amené à parler de l’œuvre de son confrère et à devoir exprimer la perception qu’il en avait, son ressenti, tout en le questionnant sur sa façon de travailler. Passionnantes et souvent très émouvantes prises de paroles.
OSP :
Est-ce que l’histoire du lieu vous a influencé dans votre perception des performances proposées ?
Didier Flamand, vous êtes acteur, metteur en scène et réalisateur, parlez-nous de votre rencontre avec ON STAGE PHOTOGRAPHY qui s’est d’abord faite du point de vue du spectateur. Résonne-t-elle avec certaines de vos réalisations ? Et en quoi ?
DIDIER FLAMAND :
Oui, je peux dire qu’elle résonne tout particulièrement avec certaines de mes réalisations théâtrales qui ont été conçues pour des lieux qui n’étaient pas des théâtres mais d’anciens hangars ou bâtiments industriels, lesquels, par un phénomène de fusion entre leur histoire propre, celle du temps, et la mise en scène, ajoutaient aux propos de la pièce un décalage souvent très intéressant, vecteur d’émotions rares et précieuses.
OSP :
Vous habitez Arles et avez une habitude des Rencontres photographiques, comment avez-vous vécu ces moments dans l’Amphithéâtre d’Arles en juillet ?
DF :
Très agréablement, découvrant autrement ce lieu que je connais bien mais dédié avec ON STAGE PHOTOGRAPHY à de nouvelles occupations qui permettent non seulement de le mettre en valeur mais de faire partager par la même occasion à un nouveau public la richesse incroyable qu’offre Arles pour le développement d’évènements culturels.
OSP :
Que vous a apporté d’inattendu cette relation de la scène et de la photographie proposée par ON STAGE PHOTOGRAPHY ?
DF :
J’ai beaucoup aimé le principe qui consistait à mettre face à face deux photographes avec les En Apartés, chacun étant amené à parler de l’œuvre de son confrère et à devoir exprimer la perception qu’il en avait, son ressenti, tout en le questionnant sur sa façon de travailler. Passionnantes et souvent très émouvantes prises de paroles.
OSP :
Est-ce que l’histoire du lieu vous a influencé dans votre perception des performances proposées ?
DF :
Pas spécialement, si ce n’est par le décalage délicieux, comme je l’ai dit un peu plus haut, qui opère dans ces lieux marqués par leur histoire spécifique et leur rapport au temps, qui viennent coiffer l’événement, quel qu’il puisse être, et vous replace à votre propre échelle, vous permettant souvent de vivre, par comparaison, ce qui vous est offert avec d’autant plus d’intensité.
OSP :
Vous êtes également un amateur éclairé de photographie, et appréciez particulièrement les appareils argentiques. Pouvez-vous nous partager ce goût pour la photographie et votre pratique ?
DF :
Il est évident que la photographie a toujours été pour moi, tout comme le cinéma, un art visuel très important que j’ai eu moi-même la chance de pouvoir pratiquer, me rappelant à cette occasion l’époque épique où je développais mes propres photos à la nuit tombée dans la salle de bain de mes parents et où tout devait se retrouver parfaitement en ordre le lendemain matin ! Je suis bien évidemment très assidument les nombreuses expositions initiées par Les Rencontres de la photographie d’Arles, ce qu’elles offrent à voir en tout domaine et à méditer ! Je me suis d’ailleurs remis à la photo il y a quelques années mais, dois-je l’avouer, en utilisant un appareil photo numérique, et prépare tranquillement ce qui j’aimerais pouvoir être, un jour prochain, une exposition.
OSP :
En quoi partager à nouveau la scène avec Jean-Marc Barr a été significatif pour vous ?
DF :
Au-delà de l’occasion qui m’était donnée de partager cette lecture avec Jean Marc Barr, que je n’avais pas revu depuis longtemps, l’ayant découvert, par l’intermédiaire de Jean Reno, à l’époque du Grand bleu, c’était surtout et avant tout retrouver un acteur et une personne dont j’apprécie grandement le travail mais aussi la grande simplicité, la générosité et la disponibilité sans oublier, et c’est à souligner, l’indépendance réelle et les choix qu’il a fait. Me dire qu’il y a encore aujourd’hui, dans cette famille qui est la nôtre, à l ‘époque des réseaux sociaux, des influenceurs et des influenceuses, des personnes avec ces qualités est toujours plus que réconfortant et ne fait qu’enrichir le plaisir du partage dans le travail.
Pas spécialement, si ce n’est par le décalage délicieux, comme je l’ai dit un peu plus haut, qui opère dans ces lieux marqués par leur histoire spécifique et leur rapport au temps, qui viennent coiffer l’événement, quel qu’il puisse être, et vous replace à votre propre échelle, vous permettant souvent de vivre, par comparaison, ce qui vous est offert avec d’autant plus d’intensité.
OSP :
Vous êtes également un amateur éclairé de photographie, et appréciez particulièrement les appareils argentiques. Pouvez-vous nous partager ce goût pour la photographie et votre pratique ?
DF :
Il est évident que la photographie a toujours été pour moi, tout comme le cinéma, un art visuel très important que j’ai eu moi-même la chance de pouvoir pratiquer, me rappelant à cette occasion l’époque épique où je développais mes propres photos à la nuit tombée dans la salle de bain de mes parents et où tout devait se retrouver parfaitement en ordre le lendemain matin ! Je suis bien évidemment très assidument les nombreuses expositions initiées par Les Rencontres de la photographie d’Arles, ce qu’elles offrent à voir en tout domaine et à méditer ! Je me suis d’ailleurs remis à la photo il y a quelques années mais, dois-je l’avouer, en utilisant un appareil photo numérique, et prépare tranquillement ce qui j’aimerais pouvoir être, un jour prochain, une exposition.
OSP :
En quoi partager à nouveau la scène avec Jean-Marc Barr a été significatif pour vous ?
DF :
Au-delà de l’occasion qui m’était donnée de partager cette lecture avec Jean Marc Barr, que je n’avais pas revu depuis longtemps, l’ayant découvert, par l’intermédiaire de Jean Reno, à l’époque du Grand bleu, c’était surtout et avant tout retrouver un acteur et une personne dont j’apprécie grandement le travail mais aussi la grande simplicité, la générosité et la disponibilité sans oublier, et c’est à souligner, l’indépendance réelle et les choix qu’il a fait. Me dire qu’il y a encore aujourd’hui, dans cette famille qui est la nôtre, à l ‘époque des réseaux sociaux, des influenceurs et des influenceuses, des personnes avec ces qualités est toujours plus que réconfortant et ne fait qu’enrichir le plaisir du partage dans le travail.