Le photojournalisme que j'ai connu dans les années 1980 n'a plus lieu d'être. Les ponts sont jetés car comment nommer ce travail ? Un documentaire ? Un travail de photographie contemporaine ? Un témoignage ? Qu'importe comment vous le percevez, l'important c'est qu'il y ait une réflexion ! C'est le propre d'un travail journalistique, photographique, artistique. L'auteur peut prendre le biais qu'il voudra, du moment que le spectateur soit réceptif au questionnement. Le but est de photographier une personne, et sur la même vue faire une superposition de ce qu'elle voit, ce qu'il y a donc derrière mon dos. On nous reproche souvent notre point de vue, notre cadrage dans mon métier de photographe. Car un cadrage dirige le regard, l'opinion du spectateur, il n'y a donc pas de vérité absolue. De ce fait, j'élargis la scène en montrant le recto-verso de ces lieux de chaos, qu'ils soient politique, conflictuel, sociétal, climatique, écologique...
Eric Bouvet

Éric Bouvet répond, avec ses doubles expositions à la chambre 4×5, à la séculaire question de l’objectivité d’un reportage photographique, questionnement plus que d’actualité en cette ère d’information intoxiquée. Ce n’est qu’une chimère, une utopie qui dénue le photographe de son humanité et de ses ressentis, de ses peurs latentes ou de son imaginaire, que de penser qu’une photographie n'exprime pas le regard de celui ou celle qui la capture. ... Enfin, Eric se demande si cette nouvelle écriture, qui jette un pont entre le reportage et le travail plasticien ne serait pas une réaction à l'émergence de tant de souvenirs, de tant de personnes rencontrées, comme si son passé refaisait surface en se révélant dans les détails de ces photographies...
Alice Santinelli